Arrêtez, stop ! Ça va trop vite ! Il faut une mise au point ! Il y a abus de photos. Une photo, c’est quoi ? C’est un cliché qu’on fait de son environnement immédiat pour avoir un aide-mémoire. « C’est la base », comme il est dit par tout le monde et à tout bout de champ.
Pour continuer sur le même registre, je dirai : « à la base », une photo c’est une image pour ses souvenirs personnels. Même si, plus tard, il y en a qui sont collectées pour être utilisées comme documents. D’ailleurs, depuis l’apparition de la photographie, l’Histoire s’écrit avec ces preuves visuelles, pour illustrer les réalités passées. Peu à peu, les photos de presse ont pris de l’ampleur et on assiste, grâce à elles, aux réalités du monde. On peut donc dire que la photo a quitté le cercle privé pour tomber dans le domaine du public. Et voilà qu’on lit, çà et là, le déroulé de procès pour atteinte à l’image. Certains poussent des cris d’orfraie quand ils voient l’œil d’un appareil photo dirigé contre eux. « Non, une photo, c’est privé ! » « Je vous interdis, j’ai mon droit à l’image ! »
Sur ses réseaux sociaux, on est chez soi
Pourquoi alors Facebook et Instagram deviennent-ils des rendez-vous pour des exhibitionnistes qui semblent faire fi de leur droit à l’image ? Parce que sur ses réseaux sociaux, on est chez soi. Mon Facebook, ce n’est pas Vogue. C’est Maison et jardin ou LesVeillées des chaumières. Je me délecte des images de tartes, de bœufs bourguignons, de tricots faits main, de décos de table, de fêtes au jardin et de promenades au bord de l’eau ou au fond des bois.
De Vidéo gag à Facebook
Mon Facebook n’est pas Vogue avec des corps alanguis, des poses cambrées avec une jambe raidie en avant et la tête renversée, des étalages de seins nus – même si « c’est pour une bonne cause. Si vous regardez bien j’ai mis le ruban rose ». OK, et si sur un cliché vous mettez l’étiquette du panda de WWF pile à la place de la feuille de vigne biblique, votre scrogneugneu poilu devient-il un emblème de votre militance pour les animaux ?
Rhabillez-vous ! Je ne veux pas de poils au milieu des photos de soupe. Mais, me direz-vous : « Il y a un public ! ». Je sais ma brave dame ! Et ils ont des suffrages. Plus c’est barré, plus c’est zarbi, plus ça attire. Des millions de likes. Plus de clics en une semaine que de spectateurs pour Johnny toute sa vie. Plus besoin d’avoir le talent de Van Gogh pour épater les foules (après ta mort en plus), il suffit que tu te filmes en train de glisser ta tête dans une bouteille chauffée et c’est bon ! « Nicht ärgern nur wundern » (ne sois pas en colère, sois surpris), dirait mon beau-père Karl Dreikaus.
Ça me rappelle des temps pas si lointains où, déjà, les parents faisaient tomber exprès leurs enfants des balançoires ou mémé dans les escaliers… Pour faire rire le public de Vidéo gag et atteindre le Nobel virtuel du talent, lorsque leur vidéo était consacrée « buzz mondial » dans tous les bêtisiers de Noël.
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