Tournez manège Ce n’est pas par excès d’humilité que Macron demande soudain qu’on le considère en outsider dans la course à l’Élysée. Dans les limbes agités d’une campagne imprévisible, l’ancien ministre de l’Économie pressent le péril de passer pour favori. Le feu nourri des autres candidats sur sa personne confirme le danger d’être en vue. Aussi jeune soit-il, l’énarque retient la leçon de l’histoire des présidentielles. Des Balladur, Jospin ou Juppé ont lourdement chuté au pied du piédestal déjà dressé pour eux. Macron tente de se replacer parmi les candidats réunis ce soir sur un plateau télé. Pas par risque de mal paraître. Plutôt par crainte de trop paraître et d’en faire les frais ! Déjà, dans ce « tournez manège » électoral, Le Pen veut mordre sur l’électorat de Fillon, Fillon gratter des suffrages chez Macron, Dupont-Aignan draguer les déçus de Fillon et Mélenchon raboter le socle de Macron, après avoir fait ses courses chez Hamon… Ce n’est pas fini. Car en voulant ratisser large, depuis la gauche sociale-démocrate jusqu’à la droite sociale, Macron est celui qui irrite le plus de monde. Il est dépeint en bernard-l’hermite de cette présidentielle, guettant toute niche à l’abandon pour l’investir. Pas étonnant que la chasse à l’impétrant soit ouverte. Logique aussi que l’intéressé se prétende petit gibier : donné pour le vote utile face à une vague frontiste, Macron ne veut pas d’un destin de favori carbonisé. La perspective d’un vrai choc de vrais programmes s’éloigne. Dans cette guerre de positions, les armes sont à géométrie variable et à portée adaptable. Attaques personnelles et petites phrases priment, pour l’instant. À croire, comme dans certaines fables, qu’on ne puisse plus gagner de voix qu’aux dépens d’autrui. |
Didier Rose
L’éditorial
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