C'est une belle vie, que celle de container pour verre perdu.
D'abord, on peut s'alanguir partout. Pas seulement dans les fonds de banlieue.Dans les beaux quartiers aussi, le container s'expose. Y compris dans les sites les plus choyés. Le tout, sans devoir justifier de quelque permis que ce soit, ni craindre de représailles. Contrairement à un vulgaire scooter, pilier honni des trottoirs urbains.
Simple exemple : à Strasbourg, un container trône entre l'une des plus belles églises de la ville et le tribunal tout aussi remarquable. Difficile de cadrer le dôme de la première de profil sans se taper la benne en avant-plan : les voies du recyclage savent être incontournables.
Bling bling
Ensuite, autre particularité enviable, un container à verre n'est jamais seul.
Des visites tout le temps ! Tôt le matin, tard le soir, les week-ends.
Les veilles de fêtes, les fêtes, les lendemains de fête. Pratiqué par les fidèles du lundi, les noctambules vasouillants ou les insomniaques maniaques, le jet de bouteilles jamais ne connaît de repos.
Pas plus que les riverains, donc. Autre privilège du container à verre perdu, lui au moins peut faire du grabuge quand bon lui semble, sans risque de poursuites pour tapage.
Un genre de cigales qui, ayant chanté tout l'été, ne se trouve dépourvu ni quand la bise, ni quand la nuit est venue.
Et capable de partager, avec ça. Dernière qualité du container de récupération de verre, il n'est pas égoïste.
Lui sait offrir à qui mieux mieux les notes cinglantes du bris de verroterie. Qu'il porte, et fort, le claquement des canettes bazardées et des litrons épuisés, musique quotidienne des riverains même lointains.
Il faut habiter à proximité d'un container à verre pour en apprécier tous les avantages.
Ce qui n'est sans doute pas le cas de bien des édiles. Et c'est dommage. Près d'un container, ils entendraient d'une autre oreille la vie en ville.
Didier Rose
Je pense donc je lis les DNA