| L'été sur un autre pied. La cheville cette année se porte dégagée. Sur les pavés, il n'y a peut-être pas la plage. Mais, à vue de nez, c'est tout comme : les claquettes courent les rues. C'est même un bing-bang de la sandale, le bingo des tongs. Même sous nos climats résonne le clap-clap des savates portées à la légère. Pas une tendance : plutôt une lame de fond, le raz-de-marée n'est plus loin. On pensait les spartiates cantonnées aux bords de mer. Géographie à la petite semelle. Loin des mouettes et des brises marines, la sandalette donne aux cités les plus continentales, y compris en Alsace, un air de Strasbourg-sur-Mer, de Mulhouse-Plage, de Port-Colmar. A tong et à travers C'est peu dire que le paysage urbain a pris des allures maritimes. Au ras du bitume, comme un océan de godasses qui claquent sous le talon, des nuées d'orteils en goguette. Autant être franc : côté panorama, ce n'est pas le panard. Se cogner les ripatons des voisins sur une terrasse, à la chandelle, on connaît plus romantique. Voir défiler les pinceaux pas toujours ragoûtants des touristes jusque dans des lieux à élévation spirituelle, voilà de quoi ramener sur terre. Quant aux transports en commun, à certaines heures, on se prend les fumerons de ces demoiselles à toutes les sauces (bonjour les vernis fatigués), les arpions velus de ces messieurs en prime. Manque plus que le pédiluve à la prochaine correspondance. Bref, on l'aura compris, les tongs ne posent pas qu'une question plastique. Après le short, le tee-shirt décapotable à hauteur de nombril et le string apparent, la claquette met sans doute une nouvelle claque à certaines hauteurs de vue sur les bienfaits du progrès. A moins qu'il ne faille y voir un effet collatéral de la crise. Plus de tongs, c'est moins de textile, moins de cuir, moins de caoutchouc. Donc, au final, moins de dépenses. Le retour des va-nu-pieds ne serait donc pas fortuit. La tong, modèle social pour remettre tout le monde sur un pied d'égalité ? Didier Rose Je pense donc je lis les DNA |